• Veux-tu être mon jouet?

    Veux-tu être mon jouet?

      Kiharu Kurosawa était une jeune étudiante, nouvellement arrivée au lycée Shôtoku. Ce nom lui plaisait bien, et les cerisiers qui en bordaient l'allée semblaient si apaisants. Mais elle découvrira bientôt qu'ici, le repos n'est pas pour tout le monde. Rintaro Shirai, à la tête d'une bande d'une quinzaine d'élèves, règne sur le lycée en maître. Incroyablement timide, elle trouvera en Kazuya, un ami protecteur malgré ses airs distants. Ensemble, ils subiront la colère de Rintaro et feront la rencontre de Yachiru Ikeda, elle aussi élève au lycée. Les trois deviendront amis, et tenteront d'échapper aux pièges qu'on leur tend. Avec le soutien de Yamashita, ils essaieront de renverser le tyran de son trône. Jin Akanishi, quant à lui, avait choisit le camp adverse. Mais lorsqu'ils commencera à douter du bien fondé de ses actes de violence, tout sera remis en question.

     
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  • Chapitre 1

    Point de vue de Yachiru


    - Geki s'il te plait retourne à ta place et laisse ta copine tranquille ... 

    - Toi t'as rien à me dire! Arrête de mater le décolleté des filles et on en reparle après le vieux.


      Et voilà. Geki avait encore joué son petit rebelle. Vous pensez peut-être que des rires emplissaient la salle de classe? Détrompez vous, les sourires que l'on pouvait y voir sont crispés, forcés pour satisfaire le trouble-fête. Moi je ne souriais pas. Je ne souriais plus depuis longtemps. Ils m'énervaient tout simplement, lui et ses acolytes, « la bande à Rintaro » comme ont disait ici. Je faisais la gueule et personne ne me disait rien. C'était bien comme ça: je ne les cherchais pas, ils me laissaient tranquille. C'était sûrement la seule qualité que je pouvais leur trouver. Ah au fait, je m'appelle Yachiru Ikeda, et bienvenu dans ce qu'était mon lycée. Avant tout, il faut que vous ayez connaissance d'une chose: la hiérarchie qui régnait ici. Hiérarchie, oui parfaitement, je devrais même dire : « vous devez savoir qui avait le pouvoir », mais ça fait un peu glauque comme présentation alors j'éviterais. Au lycée Shôtoku, Rintaro Shirai et ses brutes régnaient en maître grâce à leur futile force physique. Mais qui irait contester le pouvoir établi devant des mecs aux bras plus gros que vos mollets? Tout le monde tremblait devant eux, et pas besoin de vous faire un dessin pour comprendre qu'ils en profitaient bien. Le chef de cette bande, Rintaro, était dans la classe voisine à la mienne, un peu de malheur en moins. C'est sûrement le genre de gars que je hais le plus au monde: il usait et abusait de violence gratuite; peu importe à qui, il s'en prenait, les plus faibles y passaient aussi; il ne se battait jamais contre quelqu'un qu'il savait plus fort que lui, fallait pas qu'il se fasse mal le pauvre chou, pour ça il laissait faire ses chiens, ses « amis »; et par dessus tout ça, il possédait un ego sur-dimensionné qui n'avait pas raison d'être. C'est le genre de personne qui se croit forte et puissante à faire baisser la tête des autres par ses sales mains crasseuses. Il puait la dignité mal placée. 

      Mais je ne vais m'éterniser sur le sujet, passons. Mon nom, vous le connaissez déjà, mon âge? 16 ans à l'époque. Shôtoku est le seul lycée que j'ai connu. Je ne peux pas savoir s'il y a mieux ou pire ailleurs, et puis ce lycée, je m'y suis fait très vite. Je ne suis pas vraiment sociable, alors m'intégrer parmi les élèves, je m'en foutais royalement. Si personne ne voulait manger avec moi le midi, qu'est-ce que ça pouvait me faire? Je n'ai jamais recherché la compagnie des autres, je m'en méfie. Et ce n'était pas les exemples que j'avais sous les yeux qui aurait pu me donner tord. Ma famille ? Absente. Fade sera peut-être plus approprié. Disons qu'elle me servait d'entourage et que grâce à elle j'avais un toit. Ne pensez pas que je n'ai pas aimé ma famille, j'aimais ma grande sœur. J'aimais. Elle est morte il y avait quatre ans alors, tabassée par des inconnus ivres. Des hommes qui avaient envie de jouer. Mes parents, eux, étaient fades. Ils étaient là mais servaient de décor. Les seules phrases que l'on pouvait échanger étaient de banales « Okaeri », « Ah! Yachiru ! On mange des gyoza ce soir. »-celle-ci devait bien être la plus longue-, « Bonne journée? ». Bonne journée: exemple type de leur désintérêt pour mon cas. Ils savaient depuis longtemps que je suis une incurable solitaire, que mes journées se résument en un seul mot, mais pour leur éviter le soupçon de culpabilité qu'ils pouvaient avoir, la réponse était toujours positive. Inutile de poursuivre avec des questions du genre « et les amis ça va? », ils ne voulaient surtout pas entendre la réponse. Un certain temps avant, il y avait des années, ils se démenaient pour me coller avec d'autres de mon âge -qu'ils appelaient « mes amis» avant même que je n'ai vu leur visage- et essayaient de me convaincre que les autres n'étaient pas méchants. Ce ne fut que plus tard que je compris qu'ils essayaient juste de faire bonne figure face aux autres parents. On en apprend des choses en grandissant. Je leur pardonne bien sûr, ils sont humains. Et puis ils n'avaient pas toujours été comme ça, et leur affection n'avait pas toujours été fictive. Quand ma sœur était encore là pour jouer avec moi, nous allions bien. Mais ça remonte à si loin maintenant, ça n'est plus qu'un vague souvenir édulcorer et naïf. Ah, je m'éternise encore.

      Voilà enfin la sonnerie, je vais pouvoir prendre l'air. Attrapant mon sac, je me lançais sur mon trajet quotidien avec la lenteur de l'habitude. Direction l'avant dernier étage, la dernière salle à droite au bout du couloir 4B. Le toit était trop prisé pour moi, et ne parlons pas de cette plaque de béton qui servait de cour. Je préférais cette petite pièce délabrée et toujours vide à ce fourmillement constant que vous inflige la vie en communauté. Parfois je me demandais qui pouvait bien occuper cette salle avant le changement de directeur. Je me plaisais alors à imaginer une classe de parfaits petits bourgeois, assis droits comme des soldats, confortablement installés derrière leurs bureaux rangés en trois impeccables colonnes. Ils écouteraient attentivement un professeur aussi sec que sa craie, qui réciterait son cours comme s'il avait appris par cœur. De temps en temps, un des élèves ne donnerait pas la bonne réponse, mais cela ne provoquerait aucun rire, il se prendrait un joli coup de bâton sur les doigts et s'appliquerait à garder le regard vissé sur sa feuille jusqu'à la sonnerie libératrice. Un peu strict mais j'avoue ne pas savoir quelle époque serait la meilleure. Sur mes rêvasseries, j'engloutissais mon bentô et descendis du vieux meuble poussiéreux sur lequel j'étais perchée. Aujourd'hui le lycée accueillait de nouveaux élèves. Si mes souvenirs étaient bons, il y aurait une fille et une petite dizaine de gars en plus dans notre magnifique établissement. Je me demande si Rintaro et sa meute leur offriront un cadeau de bienvenu comme pour les derniers en date. Quelque chose comme une chaise fraîchement repeinte ou un petit déménagement surprise du casier. Un chouette souvenir pour les nouveaux arrivants en tout cas.

      Je descendais les escaliers quatre à quatre, j'avais encore mis trop de temps à retomber sur terre. J'arrivai enfin en classe, je n'étais pas la dernière, ça allais. Je n'étais jamais la dernière. 

    - Hey ! Le prof ! Y devait pas y avoir une nouvelle élève ici ! 

      C'est ça Geki, gueule un peu si ça te fait plaisir. 

    - Si, mais elle est dans la classe d'à côté. Ici nous accueillerons une partie des garçons.

      Ah il était vexé là! Bah oui, petit Geki n'aura pas son nouveau jouet. Alors qu'il allait encore protester, un de ses copains lui fit signe de se taire, et il se rassit gentiment. Brave petite bête. 

    - Je vous laisse vous présenter. Dites nous vos nom, ça nous suffira. 

      Il m'arrivais d'avoir pitié de ce professeur. Pas souvent. Mais il avait une qualité essentielle pour survivre ici: il était dépressif de nature. Parmi les nouveaux, aucun ne semblait particulièrement violent, ni éventuellement facile à soumettre. Je me demandais quel genre d'élève il deviendrait. Un grand châtain, les cheveux raides et une demi frange devant l'œil gauche s'avança nonchalamment du petit groupe.

    - Je m'appelle Yamashita Tomohisa, enchanté. 

    - Merci, tu peux aller t'assoir ...


      Le professeur n'eut pas le temps de finir que le dit Yamashita s'installait déjà à la place du fond, le bureau en bois gris, un peu à l'écart des autres. Lui, s'était officiel, il s'avérait être un solitaire. Avec cet air imperturbable, Rintaro ne devrait pas trop le chercher. Après ce magistral exemple, les trois autres nouveaux suivirent et se dispersèrent un peu partout, comblant les trous dans le plan de classe. On entendit soudainement un fracas de rires provenant de la salle voisine. Sûrement celle qui devait recevoir les autres arrivants. Puis le calme retomba et le cour commença, dans une étrange et lourde ambiance. Quelque chose se préparait.
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    Point de vue de Kiharu

      Premier jour de classe encore une fois dans un nouvel établissement. Je déménageais souvent, au moins 6 fois par année mais mes parents m'avaient affirmé que c'était bien la dernière. Je l'espérais car à chaque fois, je me sentais nerveuse, un peu trop peut-être. J'avais la nausée juste à l'idée de rencontrer de nouvelles personnes. Bien que je sois une fille extrêmement sociable, j'ai peur de ce qu'on peut penser de moi. Est-ce que j'allais m'intégrer facilement? C'est la question qui circulait en permanence dans ma tête. Étais-ce normal de paniquer autant? Bien sûr car j'étais en territoire inconnu. 

      Ah j'oubliais! Je m'appelle Kiharu Kurosawa. J'étais une petite lycéenne au lycée Shôtoku. J'avais alors 15 ans et comme toute adolescente qui se respecte, j'ai eu mes hauts et mes bas. Ma famille? Un peu trop riche et rarement à la maison. Mes parents travaillaient tout le temps, ils avaient rarement le temps de se préoccuper de mon existence. Du coup, c'est moi qui m'occupais de tout. Du plus loin que je me souvienne, ça a toujours été comme ça. À peine capable de marcher et de parler, je me débrouillais pour ma survie personnelle. Une chance que je n'ai eu ni frère ni sœur, qu'est-ce que je serais devenue sinon? Une fille sans vie? Non-merci. L'adolescence est vraiment le meilleur âge pour s'amuser. Des amies? J'en ai déjà eu mais à force de déménager, je ne m'étais fait de lien avec personne de peur d'être blessée par mon départ. 

      Il était l'heure de partir. Je pris mon sac en main et d'un pas lent, je me dirigeai vers la porte à gauche. Le cerisier en fleur sur le pas du chemin sentait merveilleusement bon. J'adorais cet arbre. Tellement jolie avec ces couleurs, bien que je n'aime pas forcément le rose. Cette couleur lui allait très bien. Il y avait des élèves qui portaient le même uniforme que moi sur le bord du trottoir. J'imaginais qu'ils allaient au même lycée. Je baissais la tête et regardais les pas que faisaient mes pieds à chaque mouvement de mes jambes. J'adorais regarder où j'allais et encore aujourd'hui, c'est toujours le cas. Un troupeau d'élèves de différents niveaux étaient postés devant le lycée. Je me faufilais entre eux, en faisant bien attention de ne pas me faire remarquer. Toutefois, j'entendis leurs murmures :

    - Tu as vu? C'est la nouvelle élève?

      Ils semblaient tous très exciter à la mention qu'une nouvelle élève soit dans ce lycée. Je sentais que j'allais bien m'amuser ici. Bien sûr, c'était sarcastique! Moi, qui voulais passer l'année inaperçue. C'était raté! Un homme d'environ 5 pied 8, les cheveux noirs en bataille et aux lunettes rondes s'approcha de moi et s'arrêta. Je le regardais droit dans les yeux. Il m'observa puis ouvrit la bouche délicatement :

    - Konnichi wa! Tu es sans doute Kiharu Kurosawa? Je suis ton professeur principal. Si tu veux bien me suivre?

      Sans dire un mot. Je le suivi dans les couloirs. Ceux-ci étaient plus immenses les un que les autres. J'espérais ne pas me perdre une fois toute seule. Il s'engouffra dans le cadre de la porte en se faufilant entre un groupe de garçons puis s'installa à son bureau respectif. Ils le suivirent quelques minutes plus tard. Je jetais un coup d'œil dans la pièce et je vis que les élèves avaient déjà prit place. J'étais intimidée. Je restais dans l'embrasure de la porte, complètement figée. Soudain, j'entendis les garçons se présenter à tour de rôle. À croire que je n'étais pas la seule à être nouvelle mais je sentis le stresse qui provoqua un petit frisson sur mes avant bras car j'étais la seule fille:

    - Vous pouvez dire votre nom et l'endroit d'où vous venez. Ça ira!


      Les garçons se présentèrent les un après les autres. Le dernier me donna l'impression étrange qu'il était le meneur de tous les autres:

    - Je m'appelle Akinishi Jin. Je viens du lycée Suzuran.

      Je sentis alors une petite tension venant des élèves, ils se regardèrent tous d'un air étonné. Je crois que cela venait de la mention du nom du lycée. Les présentations étant terminés, le professeur s'apprêta à prendre les présences jusqu'au moment où un élève sans doute trop curieux demanda sans crier gare :

    - Monsieur, j'ai vu la nouvelle élève dehors à l'entrée. Elle sera dans notre classe comme les garçons là-bas?

      L'élève pointa du doigt les personnes conscerner. Le professeur garda son calme, leva les yeux sur cet élève puis souffla :

    - Oui elle sera dans notre classe. D'ailleurs, je l'ai dirigée ici, elle devrait déjà y être. 

      Il me chercha du regard sans m'apercevoir :

    - Kiharu? Kiharu? Vous pouvez venir. Il n'y a aucun problème. Entrez. 

      Je pris une grande respiration, toujours en gardant les yeux rivés sur mes chaussures. Je m'engouffrais dans l'encadrement de la porte :

    - Voilà Kiharu Kurosawa! Une nouvelle élève. Accueillez-la comme il se doit s'il vous plaît. 

    - Waw! C'est trop génial! S'exclamèrent les élèves en cœur.

    - Alors Kiharu, peux-tu faire une présentation de toi. D'abord d''où venez-vous?

      Je gardais mes yeux sur mes pieds sans lui porter aucune attention. Voyant que je gardais le silence, il continua sur un ton jovial:

    - Quel est le lycée que vous avez fréquenté précédemment? Qu'est-ce que vous aimez? Qu'est-ce que vous n'aimez pas? 


    Je levais soudain les yeux vers lui et dans un souffle, je m'exclamais :

    - Je n'aime pas les présentations devant les gens.

      Les élèves rirent tous aux éclats. Le professeur très surpris continua sur la même jovialité en se massant l'arrière de la tête :

    - Alors tu peux t'asseoir à cette table là-bas. Tout près de Kazuya. 

      Je pris alors place à la table inoccupé au côté d'un jeune homme au teint café et aux cheveux noirs comme l'ébène, déposais mon sac par terre et je sentis mon visage brûler comme si j'étais dans un four à 400°C. Je sentais que quelqu'un m'observait de loin.

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    Point de vue de Kazuya


      À l'époque, j'avais l'impression que ça faisait une éternité que j'étais assis sur ce banc d'école à contempler le tableau en face de moi. Je me demandais pourquoi mes camarades de classe étaient tous excités. Je l'avais compris à la vue de cette fille, un peu trop timide et renfermée à mon goût. À chaque fois qu'arrivait une nouvelle élève, c'était la même histoire. La bande à Rintaro s'en prendrait à cœur joie pour lui faire un accueil digne de ce nom. Lui et sa bande régnait sur Shôtoku depuis près de 3 ans. Ils avaient pris le plein pouvoir des lieux à l'aide de leurs bras et maintenant tout le monde avait peur d'eux. En fait, je crois qu'on devient vite dépendant de quelqu'un quand on tient à sa vie. Ils n'avaient de pitié pour personne. Tout le monde passait à l'abattoir en arrivant ici et ce n'était pas prêt de changer. Les nouveaux étaient souvent les plus touchés par leurs manigances. Ne connaissant personne, ils étaient les mieux placés pour se faire embarquer dans des histoires qui pouvaient causer leurs renvois dès le premier jour. Le directeur a été acheté par le père de Rintaro donc plus rien ne pouvait l'arrêter entre ces quatre murs. Certains nouveaux étaient tellement découragés et craintifs qu'ils décidaient d'eux-mêmes de faire partie de la bande à Rintaro pour ne pas avoir de problèmes mais avaient-il vraiment le choix? C'était ça ou quelque chose de pire pourrait leur arriver. Je me demandais si elle cèderait facilement comme tous les autres avant elle?

      Un rire général me fit sortir de mes pensées. Elle semblait avoir un bon sens de l'humour. J'entendis alors mon nom dit par le professeur qui avait l'air de vouloir l'intégrer à la classe :

    - Alors tu peux t'asseoir à la table là-bas. Tout près de Kazuya.

      Et oui! Je suis Kamenashi Kazuya, un élève de Shôtoku. Une école dérangée. Dire qu'avant c'était bien mieux. Il y avait des élèves qui jouaient les gros bras mais ce n'était jamais pris aux sérieux. Et puis, si on ne les cherchait pas, on n'avait aucun problème mais maintenant un petit rien futile pouvait énerver la bande à Rintaro et ils ne céderaient pas tant que leur victime n'était pas raide morte ou bien hospitalisée d'urgence mais même là, je crois qu'ils viendraient créer des ennuis. Il faut croire que Rintaro ne possédait pas juste l'école mais aussi quelque édifice de Tokyo. Il ne m'avait jamais rien fait personnellement mais je le détestais quand même. À cause de lui, j'avais perdu ma meilleure amie. Il était toujours sur son chemin. Il la harcelait jusque chez elle. Elle a fini par se suicider. À la longue ça cause certains traumatismes sur le cerveau. Ça m'a beaucoup attristé. Elle était un peu comme ma famille, toujours là quand j'en avais besoin. Malgré ma popularité depuis son départ, je me sentais terriblement seul. Je n'avais pas l'impression d'être aimé à ma juste valeur. Je ne voulais pas discuter de mes problèmes aux autres. Et puis, dans ce lycée les professeurs ne cherchaient pas à comprendre les élèves. Ils ne voulaient pas connaître ce que l'on vivait. Ils n'avaient que les aperçus de notre petite existence d'élève. Ils ne se préoccupaient même pas des combats dans les couloirs. Ils faisaient comme s'ils n'avaient rien vu quand c'était Rintaro qui l'avait provoqué. 

      J'observais en silence, les nouveaux élèves qui venaient d'entrer dans notre classe. Il y en avait beaucoup cette année. J'imagine qu'ils venaient tous d'entrer dans le nouveau terrain de jeu du lycée. Il ne serait que des jouets entre les mains de ceux qui nous cassaient les pieds à longueur de journée à toujours chercher la bagarre. Je me lassais rapidement de ces enfantillages. Pourtant, j'avais l'impression étrange que cette fois tout serait différent. Le groupe qui était entré avant cette Kiharu semblait être des personnes aux caractères démesurés. Qu'il ne fallait pas les chercher sinon on obtiendrait leur courroux. Peut-être qu'il y aurait un nouveau clan qui remettrait de l'ordre? J'aimerais bien que ce Rintaro soit remis à sa place une bonne fois pour toute. Je le ferais bien moi-même mais je suis du genre pacifique. 

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    Point de vue de Jin


      J'ai toujours été violent. D'une manière ou d'une autre, mes poings ont toujours fini par prendre le relais de mes mots, et toujours ou presque, j'obtenais raison. Dès les débuts de la vie en communauté, ma réputation se forgea dans les coups et bientôt quelques alliés triés sur le volet vinrent me rejoindre. Ceux-ci me suivent depuis mes premières années de collèges , et avec le temps, plus que des compagnons d'armes, ils sont devenus de vrais amis. La bande que nous formions, bien qu'elle ne se soit pas assagie, n'avait jamais vraiment dépassé le stade de la petite bagarre de cour ou quelques règlements de compte le soir dans les rues du quartier. Mais aujourd'hui, je sentais que ça allait changer. Nous entrions tous au lycée Shôtoku. Il n'avait certes pas une réputation de véritable repère de violents délinquants, mais c'était déjà à un niveau au dessus de notre ancien lycée, Suzuran, pas vraiment calme lui non plus mais pas vraiment le pire de ce que l'on pouvait trouver dans le coin. Nous devions intégrer notre nouvelle classe après la pause de midi. Alors que nous étions tranquillement à attendre devant la salle, je remarquais déjà qu'un petit groupe d'élèves semblait au dessus des autres: certains étaient assis sur le dossier de leur chaise, pied sur le bureau; d'autres exhibaient quelques chaînes accrochées à leur ceinture; tous portaient un uniforme plus ou moins réglementaire ... J'avais entendu parler de ce lycée et de ses « bandes », dont la plus puissante et plus violente, d'après ce qu'on m'en avait dit, était celle d'un certain Rintaro. Peut-être était-ce eux? Notre groupe à nous avait été réparti dans deux classes, YamaPi était avec l'autre moitié de la bande. YamaPi, c'est Yamashita Tomohisa, mon meilleur ami de toujours, celui avec qui je jouais au voleur dans la cour et celui avec qui j'ai fait mes premières vraies conneries, celui qui m'a vu rire d'avoir mit parterre l'adversaire et crier de douleur sur le bitume, celui qui m'a vu vainqueur et vaincu. Il n'avait jamais suivit la tendance quand j'ai arrêté les vols à l'étalage pour les duels entre chef de clans, mais il ne m'a jamais abandonné pour autant. Il me regarde toujours de loin, de cet œil rassurant et protecteur qui lui colle si bien à la peau. Je pourrais presque l'appeler « maman » mais la seule fois où j'ai tenté ce surnom, je me suis retrouvé avec un coquart pendant deux semaines.

      Vous devez vous dire qu'il y a une raison à cette violence, je vous répondrais d'abord que lorsque les coups pointent leurs poings vers vous, mieux vaut riposter. Et puis je ne supporte pas que l'on s'obstine à me répéter que j'ai tord, que l'on m'insulte ou me contre-dise, alors, n'étant pas spécialement un pro des belles phrases, je préfère user de ma force, finalement bien plus persuasive. Peut-être pensez vous que mes parents y sont pour quelque chose, que je n'ai pas eu une vie facile et que ça m'a affecté, et bien je ne pourrais pas vous dire non, ni oui. Mon éducation n'était pas vraiment un modèle de civisme et de diplomatie mais je n'ai jamais reçu de coups de mes parents, mon père avait certes une tendance à avoir les nerfs tendu facilement et ma mère avait un certain penchant pour les boissons alcoolisées mais d'autres ont vécu bien plus mal sans pour autant tomber dans les bras d'un gang. Il faut croire que j'étais destiné à me battre. Je n'étais pas ce que l'on peut appeler un abandonné par ses parents, mais disons plutôt que ma venue n'avait pas été à leur programme. Et que cette naissance imposante qui les privaient d'une certaine liberté se traduisait par un désintérêt constant, pesant, et chronique. S'ils avaient tenté de ne pas trop louper les choses au départ, ils ont bien vite déchanté et quand j'en fut capable à leurs yeux, ils me laissèrent vivre ma vie tout seul. « Comme un grand » qu'ils disaient, on est grand à sept ans ? Certainement ... Parent, ça devait pas être leur truc, tant pis pour moi. Depuis deux ans, je vis seul. Ils m'ont laissé leur petit appartement quand ils ont déménagé grâce à la promotion de mon père. Je ne sais même plus dans quoi il travaille d'ailleurs. Parfois ils viennent me voir, quand ils rendent visite à leur propre parents et qu'il n'y a plus d'hôtel de libre. À peine une fois par ans. Je n'aime pas quand ils viennent, ils vident toujours mon frigo et j'ai horreur de faire les courses ! D'habitude c'est YamaPi qui les fait pour moi. Et puis c'est pas comme si je croulais sous l'or non plus ... Vivement que les grands-parents rejoignent les ancêtres, je serais plus tranquille, un jour par an. De tout façon cette solitude ne profite à personne, ou presque, j'ai rarement de petite copine. Soit elles ont trop peur de ce qui pourrait leur tomber dessus à traîner avec moi, soit c'est juste pour un soir. Moi ça me convient: une soirée arrosée ou un bar pas super bien fréquenté où on me laisse passer malgré ma foutue minorité, une fille facile et on en reparle plus le lendemain. Ma vie sentimentale est un véritable néant, mais on y survit très bien, regardez-moi.

      Après quelques minutes d'attente dans le couloir, le prof arriva enfin, suivit d'une autre élève, apparemment nouvelle elle aussi puisqu'elle se plaça bien sagement derrière nous. Une fois le professeur installé et après qu'il nous ai prié de venir, on put enfin entrer. Chacun notre tour, nous nous présentions et on se dispersa un peu partout dans la classe. Puis ce fut au tour de cette Kiharu de s'assoir, trop timide pour se présenter, et le cours commença doucement. Le groupe de tout à l'heure se retournait de temps en temps pour nous dévisager, je détestais ça. J'avais réussit à dénicher un bureau libre où je m'étais installé avec Koki, un gars de ma bande, un mec loyal et enfantin toujours partant pour une petite baston. Lui aussi avait remarqué les pesants regards sur nous, particulièrement dirigés vers moi.

    - Qui c'est à ton avis ?

    - T'as déjà entendu parler de Rintaro ?

    - Oui, c'est lui?

    - Je ne sais pas mais ça y ressemble, il a pas mal de gars rien que dans cette classe.


      Alors que Koki les défiait du regard, je me demandais ce qui serait le mieux pour nous: une alliance ou un affrontement. La question trouva vite sa réponse, impossible de les battre, on est en sous-nombre. Il faudra que je parle à ce Rintaro.
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    J'ai écris cette fiction, il y a bien longtemps avec une amie. On ne se parle plus aujourd'hui mais je crois pouvoir continuer l'histoire, si ça intéresse quelqu'un.


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    Point de vue de Kiharu

      Ne me sentant plus observer depuis quelques minutes, je sortie de mon sac un petit carnet pour prendre des notes suivi d'un crayon à la mine. Je lançais des regards furtifs au professeur qui donnait des explications. Je pris des notes sur ce que je trouvais le plus important. Le professeur nous tourna le dos pour écrire quelque chose de presque illisible sur le tableau à l'aide d'une craie. Un élève se leva et fit des signes aussi incompréhensibles que l'écriture de l'enseignant. Les élèves semblaient avoir peur de ses gestes bizarres. Quelques minutes plus tard, il prit de nouveau place à son pupitre. La tension était palpable. Le silence faisait vibrer l'air. On aurait pu entendre une mouche voler. Je regardais le sol quand le professeur posa une question, ce qui fit paniquer la classe. On pouvait entendre la sueur sur leur front s'écraser sur leur table. Après quelques secondes d'attente, l'enseignant fit à nouveau face à son tableau. Croyant probablement que c'était peine perdue d'avoir une toute petite réponse. Je levai mes yeux vers lui puis dans un élan :
     
    -Monsieur?

      Il sembla alors surpris d'entendre ma voix résonner entre les quatre murs de la classe. 

    - Oui ? Tu as une question ?
    - Non pas vraiment, c'est pour celle que vous avez posée ...
    - Tu connais la réponse ? 
    - Je ne suis pas sûre mais ce ne serait pas ... 


      Je n'ai pas eu le temps de finir ma phrase. Je sursautai de surprise car j'entendis une chaise de métal se fracasser contre le sol. Avais-je fais une bêtise ? Je regardai vers le perturbateur. Un petit gringalet me pointait du doigt, la même personne qui faisait des gestes flous. Il était tellement rouge de colère que des veines sortaient pratiquement de son cou. Je me sentais mal à l'aise alors je baissai mes yeux par terre. Je le sentais me poignarder du regard. Mon souffle se fit irrégulier et mon cœur battait la chamade. Je pouvais dire que j'avais peur de ce qui pouvait m'arriver. Le professeur n'avait pas l'air d'être très alarmé par la situation comme si d'une certaine façon, il en avait l'habitude.
     
    - Monsieur Nakamura. Veuillez reprendre votre chaise et vous asseoir. Nous sommes dans une salle de classe et non dans une cour de récréation. Si vous avez des comptes à rendre, veuillez le faire à la fin du cours. 

      S'il avait des comptes à rendre, mais c'est de moi qu'il parle ? Je ne me sentais pas mieux sur le moment. D'ailleurs, j'ai été un peu surprise que le dit Nakamura fit les quatre volontés du professeur. Il semblait être un rebelle alors pourquoi avoir fait ce que le professeur avait demandé ? Cependant, je pu reprendre mon souffle.
      Le cours repris de plus belle. Le professeur tourna son dos au tableau et toute la classe était plongée dans le silence total comme si rien ne c'était produit quelques minutes plus tôt. J'essayais d'oublier ce petit accrochage mais sans succès. Je voyais son visage aux regards haineux, son doigt en ma direction, ses veines qui gonflait le long de son cou. L'image me hantait. Je n'arrivais plus à me concentrer sur le cours. Je n'entendais plus les explications du professeur. J'étais complètement dans la lune. Décidément, je ne suis pas la bienvenue entre ces murs.

      La sonnerie retentit, ce qui me fit sortir de mes pensés. Enfin sauvée par ces quelques notes. J'allais pouvoir me reposer un peu. Tous les élèves se dirigeaient rapidement vers la porte. Probablement pressés de sortir de l'école. Je me précipitai à ranger mon carnet et mon crayon dans mon sac, quand une main se posa violement sur mon pupitre. Je levai alors les yeux vers mon interlocuteur. C'était Nakamura. J'ai été prise de panique. J'essayais tant bien que mal de me lever et partir en courant mais quelqu'un me retenait. M'empêchant de me lever. Alors je posai mes yeux rempli de peurs dans ceux de Nakamura. Un bleu azur des plus rares. Il avait mis ses mains dans ses poches comme pour démontrer qu'il n'est pas là pour se battre. Il était accompagné de deux garçons qui affichaient leurs mécontentements. Bien sûr, ce genre de personnes n'agit pas seul. Il ouvrit enfin la bouche, ce qui me coupa à nouveau le souffle. Mon cœur battait à me rompre la poitrine :

    - Écoute-moi bien l'avortons. Ici, c'est nous qui commandons. Tu n'as rien à dire. On décide et c'est tout. J'ai demandé le silence complet et toi, tu as tout cassé en une seconde. Tu vois toute l'école nous appartient et les élèves sont sous nos ordres et tu devrais en faire autant si tu veux rester en vie assez longtemps pour avoir ton diplôme. Compris ? Et regarde-moi pas comme ça, je n'ai de pitié pour personne.

      Je cessai de le regarder. Je regardais plutôt le sol que je trouvais de plus en plus attirant aujourd'hui. Il prit une inspiration comme s'il s'ennuyait, je pu alors sentir qu'il restait peut-être un espoir :

    - Tu sais quoi ? On te pardonne que si tu nous achète des bières et que tu nous les apportes au parc Shinjuku ce soir. Notre chef Rintaro sera vraiment content de pouvoir te rencontrer. 

      Ils ricanèrent tous les trois à cette idée. Ce qui ne me rendait aucunement confiante. Je réfléchissais rapidement car ils semblaient s'impatienter. :

    - Alors, tu en penses quoi? 

      Ai-je vraiment le choix ? Je suppose que si je ne le fais pas, je serai torturée tout le long de mes études. Je dois prendre une décision à mon avantage :

    - C'est d'accord !
    - Très bien ! Alors à ce soir.


      Ils me regardèrent avec un sourire fendu jusqu'aux oreilles, me tournèrent le dos puis se dirigèrent vers la porte. Je pris mon sac et les suivis quelques minutes plus tard.

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    Point de vue de Jin
     
      Cela faisait quelques minutes que le groupe qui nous observait avait détourné les yeux et étaient retourné à leur conversation ou activités personnelles. L'un d'eux devait sûrement plus s'ennuyer que les autres car il se leva et se posta devant nous tous. Le gars n'était franchement pas imposant : une silhouette maigre et sèche, un sourire narquois collé sur une tête à claque, et un air de petit rebelle avorté. Seuls ses petits yeux plissés, d'un bleu clair assez original pour un japonais, pouvaient capter l'attention plus de deux secondes sur sa personne. Mais il faut croire qu'il avait une réputation, un certain pouvoir car la classe entière se figea. Il fit signe à tout le monde de se taire, enfin c'est ce que semblaient indiquer ses mouvements de bras et son regard de défit. Un passe-temps classique à faire pendant que le prof a le dos tourné quand on s'ennuie à mourir en cours. Ce prof là avait l'air habitué parce qu'on ne peut pas dire que la discrétion semblait le point fort de l'élève qui s'était levé, et malgré ça il se contenta de se retourner en soupirant une fois l'autre assit de nouveau. Il devait s'être lassé avec le temps. Ou alors il savait ce qu'il risquait en essayant de le punir. Oui, je penchais plus pour la mauvaise expérience bizarrement. 

      Le prof posa sa question dans un silence plus que tendu, du moins pour la moitié de la classe qui ne faisait pas parti de ceux qui côtoyaient Rintaro. J'étais maintenant prêt à parier que cette bande était la sienne. Ma nouvelle question : était-il ici aussi? Et si oui, qui était-ce ? Là encore j'avais ma petite idée : je penchais pour celui assit contre le mur, les pieds sur une deuxième chaise un peu plus loin. Son visage penché vers le bas, comme s'il scrutait ses genoux, plongeant ses traits dans l'obscurité de ses cheveux bruns d'où explosait une unique mèche rouge vif, l'entourait d'une aura inquiétante. Il était un des seuls à ne pas regarder les autres, et les deux gars qui l'encadraient, on aurait dit ses chiens de garde. Le cliché parfait du chef de clan presque mystique, mais je ne voyais pas d'autres étudiants qui avaient la carrure d'une tête de file. Après quelques secondes d'attente, le prof, persuadé qu'insister était peine perdue, fit de nouveau face à son tableau blanc désespérément grand pour ce qu'il pouvait y marquer. 

    - Monsieur ? 


      La voix de la nouvelle -Kiharu c'est ça ?- se fit entendre, timide et hésitante. Un peu plus et je croyais qu'il ne se retournerait jamais. Il ne devait pas être habitué à ce qu'un élève participe. 

    - Oui? Tu as une question?
    - Non pas vraiment , c'est pour celle que vous avez posée ...
    - Tu connais la réponse? 
    - Je ne suis pas sûre mais ce ne serait pas ... 


      Ah ce que les profs pouvaient me faire pitié ! Ferme ta bouche l'halluciné. On avait bien vu que tu étais surpris avec ta gueule de poisson mort! Je me serais bien levé la lui fermer moi-même mais le grincement strident d'une chaise de métal sur le sol mit un terme à sa surprise et il tourna vivement sa tête vers le perturbateur de tout à l'heure. À ce dernier d'être choqué : il avait pourtant bien demandé le silence il y avait tout juste une minute mais cette Kiharu semblait ne pas avoir compris le message. Cette fille n'était pas une rebelle, je la connaissais depuis une demi heure mais il suffisait de voir avec quelle application elle gardait les yeux vissés sur le sol pour comprendre qu'elle était trop innocente, ou juste trop stupide, pour décrypter un ordre comme celui-là. Et le regard persistant du gringalet, devenu haineux, n'était sûrement pas prêt de lui faire lever la tête de son bureau.

    - Monsieur Nakamura. Veuillez reprendre votre chaise et vous asseoir. Nous sommes dans une salle de classe et non dans une cour de récréation. Si vous avez des comptes à rendre, veuillez le faire à la fin du cours.

      Il allait répliquer mais il se stoppa rapidement, et se rassit sagement. Bizarre vu de l'extérieur. Même le prof sembla légèrement surpris, puis il reprit bien vite son cours, il n'allait pas laisser passer cette chance qu'on le laisse tranquille. Car il ne faut pas s'illusionner: s'il s'était rassit, ça n'avait aucun rapport avec l'autorité plus que basse du professeur, mais c'était bien la décision du chef de la bande. C'était le petit signe de main de celui assit contre le mur qui avait stoppé ses protestations dans sa bouche. C'était cet élève mystérieux qui avait ordonné qu'il se taise. C'était lui le chef. Maintenant j'avais ma seconde réponse. Puis l'élève se retourna sur sa chaise, non sans un dernier regard meurtrier vers Kiharu, pour se tourner vers les autres de son groupe. 

      La sonnerie libératrice arriva enfin. Tous s'empressèrent de ranger leurs affaires, quoique peu sorties des sacs, et le troupeau d'élèves se dispersa vite dans les couloirs. Il ne restait plus que le groupe supposé de Rintaro et le mien. Et Kiharu. Nakamura et deux autres gars la gardait fixée sur sa chaise. Il fallait se douter qu'il allait pas digérer sa désobéissance si vite. Mais ce n'est pas lui qui m'intéressait. Je sortais de la salle et me plaçais dos au mur du couloir, à quelques pas de la porte, attendant la sortie du chef de cette bande. Koki et mes autres gars se placèrent derrière moi, guettant la conversation qui allait suivre. Alors qu'il se levait enfin, un de ses gars se posta devant moi :

    - Qu'est-ce tu veux le nouveau ?
    - Parler avec ton chef. 
    - Quoi?! Et pour lui dire quoi , hm ? Tu sais qui c'est au moins ?! 
    - Rintaro.


      Du bluff, je bluffais totalement. Bien sûr j'avais cette intuition mais rien n'était certifié. Alors je bluffais en empruntant un ton dur et grave, comme sûr de moi. Ça le déstabilisa complétement, pauvre gars, si c'est des mecs comme ça qui composent sa bande, je voyais pas ce qu'il pouvait avoir de menaçant. 

    - Ouais c'est lui, ... alors ?! Tu lui veux quoi ?

      Bien. Rintaro était ici.

    - Lui parler
    - Fais pas le malin, je te ...
    - Kaoru ...

      La voix du gars à la mèche rouge vif le figea sur place. Une main se posa sur son épaule et il s'écarta en un bond de devant moi, laissant apparaître le chef, le visage toujours vers le bas:

    - Je suis Rintaro. C'est moi le chef ici. J'ai entendu parler de toi. Tu veux nous affronter c'est ça?
    - Pas vraiment.
    - Bon choix. Alors tu es là pour quoi, Jin ?

      Il leva enfin son regard vers moi. Je plantais le mien dans ses yeux noirs de jais. Quelques fines cicatrices bordaient son œil droit pour descendre sur le début de sa joue, ses pommettes étaient assez hautes, son regard profond, sa bouche banale passait inaperçu et ses cheveux mis-courts léchaient son cou sur quelques centimètres.

    - Je voudrais rejoindre votre groupe.

      Un sourire s'afficha brièvement sur ses lèvres, puis disparus dès qu'un de ses gars protesta : 

    - Eh! Où tu te crois toi ?! On entre pas ici comme dans un club de lecture, t'as plutôt intérêt à ...
    - Kaoru ! La ferme ! 
    - Ah , oui , pardon , je ... 


      Puis un autre gars vint plaquer sa main contre sa bouche. Les sourcils froncés, Rintaro continua: 

    - De ce qu'on m'as dit, t'es pas une de ces tapettes qui trainent un peu partout. On m'as dit vrai ?
    - Oui.
    - C'est vraiment toi qui a envoyé « le crâne » à l'hôpital ? 
    - Oui, il m'avait cherché. 
    - Hm ... quelques bras de plus, ça peut pas faire de mal ... 


      Je le fixais toujours, aucun émotion sur mon visage, à part peut être une once d'arrogance. Sa réputation je la connaissais, mais plus je le voyais, plus il me paraissait bien en dessous de tout ce qu'on pouvait dire de lui. Mais méfions nous, on ne sait jamais après tout. 

    - Je vous accepte.
    - Parfait.
    - À une condition : vous devrez faire vos preuves. 

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    Point de vue Extérieur

      La foule s'était dispersée depuis quelques pas déjà. Les groupes d'élèves se divisaient un peu plus à chaque coin de rue. Ils s'agglutinaient comme des souris les uns aux autres le plus longtemps possible, voulant retarder au maximum le moment où il n'y aura plus que leur pas pour résonner dans les rues. Mais Yachiru n'avait pas peur de la solitude. Elle l'affectionnait comme on aime méditer seul. Être seule pour mieux voir les autres. Les observer sans jamais être parmi eux vraiment, juste assez près pour les connaître et les comprendre, juste assez loin pour leur survivre. 

      Les écouteurs de son mp3 plantés dans ses oreilles, le nez niché dans son écharpe, ses yeux se baladaient sur les divers tableaux que peignait la ville à cette heure. Yachiru avait finit ses cours optionnels et rentrait enfin chez elle. La musique baignait de son mélodieux la ville qui se laissait lentement engloutir par l'obscurité. Ce genre d'entre-deux qu'offre le coucher du soleil est en général décrit comme quelque chose de magnifique, de sublime, de poétique, mais ici, dans cette ville, la lumière des fades rayons du soleil fatigué entachait par-ci par-là les murs sales d'un orange douteux, une teinte presque jaunâtre. Rien de bien romantique. Yachiru s'engouffra dans une ruelle à sa droite. Elle savait. Elle connaissait les endroits où la lumière était belle, où les images qu'elle révélait étaient belles, où la ville qu'elle n'appréciait guère était belle. À quelques mètres en face du trottoir, une statue de chat porte-bonheur était posée sur le rebord d'une fenêtre d'un restaurant. Aux dernières lueurs du jours la patte levée du félin paraissait être d'or. Les quelques notes de xylophone qui firent apparition dans la chanson semblait venir de la clochette au cou du chat. Elle pressa son pas. Il était déjà tard, et elle allait être en retard. Les cours avaient finit un peu plus tard qu'à l'habitude et elle avait fait un détour par le parc, où elle avait d'ailleurs aperçu le groupe de Rintaro s'installer. Eux ne l'avait pas vu, heureusement. Une voiture brouilla la musique quelques secondes de son bruyant passage. Yachiru tourna à gauche pour emprunter une rue plus étroite pour ces véhicules. Ici, au pied du mur de la bibliothèque poussait une touffe d'herbe. Elle s'était toujours demandée pourquoi la bibliothécaire ne l'enlevait pas. Mais à l'autre bout de la rue, dans son dos, le soleil arrivait directement pour inonder le passage, éclaboussant l'herbe d'une superbe aura incandescente. Elle remonta rapidement la rue, puis s'engouffra à droite. Encore quelques rues et elle serait chez elle.
     
    Point de vue Yachiru
     
    - Itadaima
    - Okaeri ...


      Je posais mon sac dans le vestibule le temps de me déchausser. J'étais arrivée juste à l'heure. 7H00 ? J'accrochais mon manteau et rangeais correctement mes chaussures à leur place, bien alignées, sinon on me faisait revenir pour ranger et je détestais ça. Puis je passais sans un regard vers mon père qui planchait sur ses dossiers, arc-bouté sur la table du salon. Sans un regard vers ma mère qui devait encore être occupée à la cuisine. Je filais dans ma chambre, grimpant les escaliers les yeux presque fermés. Je laissais tomber mon sac au pied de mon bureau et m'affalais sur les draps. Ah~ , je n'étais pas en retard mais j'avais dû trottiner un bon moment pour rattraper le temps perdu à rêvasser dans les rues. En bas, j'entendis ma mère allumer le poste de la télévision. Mauvaise idée maman, tu sais très bien que papa ne peut pas se concentrer avec les infos qui défilent. Mais comme toujours tu avais dû oublier, et comme toujours la voix de papa presque stressée par le travail pesta contre toi. Je voulais un peu de calme après cette journée toute particulière, mais pour ça j'aurais dû rentrer plus tôt, alors que ma mère était encore affairée en cuisine et que mon père ne faisait que marmonner devant ses feuilles. Mon bras se tendis vers mon lecteur CD, ... trop loin. Ah~ ... J'allais devoir battre cette fatigue et me lever. Résignées, mes jambes me portèrent mollement jusqu'à la table de chevet postée sous la fenêtre. Je saisis un disque au hasard et la machine l'engloutit pour laisser s'échapper quelques timides notes de piano. Je reconnu bien vite la légère mélodie : Yiruma, « Dream a little of me »; j'adorais cet album. Quelques pas à reculons, mes mollets heurtèrent doucement le matelas et mon corps retomba sur le lit. La douceur de la musique détendit petit à petit mes muscles et je repensais à aujourd'hui, les yeux clos. De nouveaux arrivants. Une unique fille dans la classe d'à côté, un certain Yamashita dans la nôtre. Rintaro et sa meute au parc. Qu'est-ce qu'ils faisaient là-bas d'ailleurs ? Enfin ils y sont déjà venu, quelques fois, mais ils avaient bien plus de « boissons » que ça. Il m'avait semblé qu'ils étaient au complet mais peut-être que l'un d'entre eux était partit chercher les bières manquantes. Bref, rien à faire de savoir comment ils allaient se bourrer la gueule. Passons. Avec toute l'agitation d'aujourd'hui je n'avais pas eu l'occasion de voir cette nouvelle élève. Je me demandais à quoi elle ressemblait. J'espérais pour elle qu'elle ait du caractère, ou alors qu'elle soit assez timide pour ne pas se créer d'ennuis. On savait tous jusqu'où peut aller Rintaro et sa stupide loi du plus fort. Je me souvenais encore du suicide de cette fille qui se faisait harceler par ces chiens. La pauvre en était devenue folle. Et avait fatalement craqué. Je revoyais son ombre furtive par la fenêtre, son corps qui tombait à toute vitesse. Et tous les regards qui s'étaient précipités vers les vitres pour apercevoir ce pantin désarticulé qui gisait sur le béton. Personne n'avait rien dit. Parce que tout le monde savait. 

      Une seule personne était sortit du rang. 

      Un certain Kazuya d'après les rumeurs que j'ai pus entendre plus tard. Il avait dévalé les étages et on l'a vu s'écrouler au côté du corps. Il priait déjà pour elle avant même que les professeurs ne réagissent et n'appellent les urgences. 

      Je me demandais s'il était dans la classe de cette nouvelle fille.
     
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    Point de vue de Kiharu
     
      D'un pas rapide, je déambulais dans les couloirs. Regardant de part et d'autre les différents locaux qui arboraient l'établissement. Toutefois, j'espérais ne pas me perdre ni rencontrer les brutes de ma classe. Je m'arrêtais tout net devant de grande porte pivotante où le nom gravé en or n'était nul autre que SHOTEN (Librairie). Je pénétrais dans la pièce sans trop savoir où me diriger. Je regardais autour de moi avec les yeux émerveillés d'une enfant. J'étais impressionnée par la grandeur de la bibliothèque. Elle devait bien faire cinq mètres de haut. Des livres à perte de vue. Je me sentais si minuscule face à la splendeur des lieux. Je ne m'attendais pas du tout à ce que la librairie soit aussi magnifique. 

      Une femme aux allures mal soignées, aux lunettes bien trop grandes pour elle et aux souliers qui claquaient sur le sol venait à ma rencontre. Ce devait être la bibliothécaire :
    - Puis-je vous aidez?

      Je la fixais dans les yeux. Un silence pesait entre nous. Je pris mon courage à deux mains et me lança :

    - Je suis nouvelle. Je me demandais à quoi ressemblait la bibliothèque de l'école. 

      Bizarrement, je me sentais en toute confiance à ses côtés. :

    - En fait, j'adore beaucoup lire. Avez-vous des romans d'aventures?

      Elle se contenta d'acquiescer :

    - Oui bien sûr. suivez-moi.

      Elle tourna les talons pour se diriger vers une étagère. Je la suivis de ce pas. Elle me montra les différents volumes placés sur la tablette du haut. Alors je tendis ma main vers un livre dont la couverture m'attirait. Elle était d'un rouge vif, des lettres en or trônaient sur la reliure :
     
    - Si vous voulez celui-ci vous devez avoir une carte pour l'emprunter. Si ce n'est pas le cas, vous pouvez aussi le lire sur place. Mettez-vous à l'aise! Les élèves sont tellement peu nombreux de nos jours à lire.
     
      Je la dévisageai un moment puis la cloche retentit à nouveau indiquant la fin des activités. La bibliothécaire reprit ses occupations comme si je n'avais jamais existé. Je déposais le livre à sa place puis prit la direction de la sortie. Je me faufilais entre les groupes d'élèves qui se précipitaient vers l'extérieur. Essayant tant bien que mal de contenir mon équilibre. Je vis enfin la lumière du jour. 

      La foule se divisait un peu plus à chaque coin de rue, me laissant enfin seule sur le trottoir.

    *****************************************
     
      Je devais me rendre au plus vite au parc. Apercevant des silhouettes au loin, Je me dirigeai instinctivement vers elles. Je présumais que c'était mon lieu de rendez-vous. Je m'arrêtai devant le groupe d'individus. Nakamura était dos à moi. Ressentant sans doute ma présence, il me fit face :

    - Ah Kiharu! Tu es enfin là! Tu me permets de t'appeler par ton prénom? 

      J'hocha la tête en signe d'approbation. 

      J'étais un peu surprise qu'il m'ébouriffa les cheveux pour détendre l'atmosphère qui se faisait un peu lourd. Nakamura me serra le bras droit puis me tira vers la table. Il voulait sans doute que je me rapproche du groupe. Il me présenta les membres qu'il essayait tant bien que mal de présenter avec droiture :

    - De gauche à droite : Koki, Jin, Nakamaru, Ueda & Taguchi. Des membres récemment ajoutés.

      À leur visages, je reconnu quelques élèves qui étaient présents cet après-midi dont ce Jin. Il avait ce visage rassurant, très protecteur mais semblait tellement vouloir être comme eux. Pourtant, j'avais la sensation du contraire. Il paraissait être à part des autres.
     
    - Au milieu, c'est Rintaro! Le chef. Tu dois sûrement en avoir entendu parler. Il mène pratiquement toute l'école comme il le désire. Et enfin, il ne reste plus que moi : Nakamura. Nous n'avons pas invité les autres membres. Nous sommes pratiquement une trentaine au total, peut-être même plus. Je ne suis pas très fort en maths. Enfin bref, tu auras compris que nous n'aurions pas été discrets si on avait été au complet. Maintenant, les présentations faites. Nous allons t'expliquer ce que nous attendons de tes compétences.

      Sur ces mots, il ria aux éclats. J'avais peur de ce qui m'attendait :

    - Hiro, ça suffit! Maintenant, c'est à mon tour. 

      Tout le monde regardait la scène, intrigués. Un membre du groupe s'avança vers moi :

    - Alors comme Hiro a fait les présentations. Je le répète. Je suis Rintaro, le meneur. C'est à ne pas oublier compris? Et donc tout ce que tu recevras comme ordre viendra de moi. Pour commencer, tu devais nous apporter les bières. Va les chercher. On t'attend. Je pourrai mieux t'expliquer avec une bouteille à la main.

      Je tournais les talons puis traversa la rue. Je me rendis au dépanneur le plus proche. Comment j'allais faire pour les obtenir? Je n'avais pas l'âge requis. Mais je le connaissais ce dépanneur. Je vais avoir des ennuis si jamais le propriétaire me reconnaissait. Il était ami avec mon père. Bien que je ne voyais pas mon paternel souvent, ses amis curieusement se souvenaient de mon existence. Si je réfléchissais bien, il pourrait me laisser partir avec les bouteilles, si j'en faisais la demande. 

      Je me faufilai entre les clients puis me dirigea rapidement vers les réfrigérateurs à l'arrière du magasin. Je m'empressai de prendre trois bouteilles format jumbo au hasard et enfin, les déposai sur le comptoir de la caisse. J'aurais pu aussi bien m'enfuir, bouteille à la main mais j'étais trop honnête pour m'aventurer de la sorte dans un chemin trop étroit. Malheureusement pour moi, je reconnu le gérant du magasin. Je souhaitais qu'il ne me reconnaisse à son tour :

    - Ça te fera 1306.95 yens s'il te plaît.

      Je lui tendis l'argent puis il les engouffra dans sa caisse. Il mis les bouteilles dans un sac. J'étais vraiment fiévreuse à l'idée qu'il puisse ne pas vouloir me les vendre vu l'âge requis pour en acheter ou qu'il me reconnaisse tout bêtement. Il ne devait tout simplement pas se souvenir de mon visage. C'était un plus pour moi. Je pris le sac et dirigea mes pas vers la sortie. Je souriais jusqu'aux oreilles. J'étais fière d'avoir pu passer sans trop de tracas. 

      Après quelques minutes de marches, j'étais tout près des garçons. Je déposais le sac sur la table, il s'empressèrent tous à l'ouvrir :
    - Hum...tu as bien choisi. C'est l'une de mes préférés Bravo!

      Je le fixais avec un regard rempli de fierté.

    - Je vais t'expliquer maintenant, ce que nous sommes. Nous avons des contacts dans d'autres lycées de Tokyo. Alors on traîne parfois avec des gens « peu recommandable » comme disent les profs. Tu vois le genre? Ça nous permet d'avoir la main longue sur deux ou trois établissement scolaire dont Shôtoku. On recrute des personnes comme Jin et ses amis pour faire régner une certaine droiture. ça fait maintenant trois ans qu'on fait ça. Forcément les gens ont peur de notre autorité mais j'adore ça! Quant à toi, ton rôle sera tout simple. Tu devras faire ce que l'on t'ordonne sans poser de questions. D'ailleurs, je trouve que tu le fais à merveille puisque tu ne parles pas. C'est parfait continue comme ça! Donne-moi ton numéro de téléphone. Je risque de t'appeler à certains moments de la journée pour t'indiquer ce que tu devras faire. Ok? Écrit-le là-dessus.

      Mes mains tremblaient. La voix de ce gars me faisait frissonner. Il avait cette façon de parler qui m'intimidait. Je ne me sentais pas bien du tout. Je n'étais pas en confiance avec eux. Je pris le bout de papier qu'il me tendait gentiment avec un crayon. J'écris mon numéro avec des chiffres un peu bâclé, des lignes un peu sinueuses. Je lui rendis après quelques secondes.
    - Tu peux maintenant partir. Au fait, arigato pour les bières. Nous sommes très fières de toi.

      Quand il me donna l'autorisation de partir. Je ne me faisais pas attendre. Je pris vite mes jambes à mon cou. Je ne voulais pas rester une minute de plus en leur compagnie. Ces gars me faisaient flipper littéralement.
     
    Point de vue extérieur
     
      Pas très loin de la scène. Un jeune homme à l'uniforme de Shôtoku était caché derrière un buisson. Il épiait les ombres dans le parc. Il distinguait à peine les silhouettes jusqu'au moment où son regard se posa sur Kiharu qui se précipitait vers la sortie du parc. Il n'en croyait pas ses yeux. Il était surpris de la voir discuter avec ces brutes. Ceux-là même qui l'avaient blessé quelques heures plus tôt.

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    Point de vue de Jin
     
    - Je vous accepte.
    - Parfait.
    - À une condition : vous devrez faire vos preuves. 


        Aujourd'hui s'annonçait être une journée mouvementée. 

      D'ailleurs, ça faisait un moment que je n'avais pas jouer des poings. Une petite remise en forme s'imposait, et cette mise à l'épreuve tombait à pic ! Je me doutais bien que pour « faire nos preuves » nous allions devoir démontrer nos capacités au combat. Et j'étais confiant. À vrai dire, ma seule crainte était qu'un de mes gars ne soit pas au meilleur de sa forme. Mais j'avais pris mes responsabilité : je les ai averti et leur ai plutôt conseillé d'éviter de sortir en boite cette nuit. Si j'en chopais un, aujourd'hui, avec la gueule de bois ou qui n'a pas encore dégrisé, il pourra dire au revoir à toute confiance de ma part et oublier nos visages. Oui, j'étais intransigeant. Mais c'était pour le bien du groupe : si l'un d'entre nous tombe, c'est une double peine : d'un, un autre d'entre nous ne pourra s'empêcher de le protéger, et de deux, on devra se coltiner ceux qu'il n'aura pas su dégommer.

      Je me levais difficilement ce matin. Comme à mon habitude, j'étais d'une humeur massacrante. Mais la seule pensée qu'une petite baston m'attendait me donnait un peu de courage pour sortir de mon état de zombie. Mon appartement était un vrai foutoir. Je m'en rendais compte de plus en plus souvent. Peut-être était-ce parce que ce bordel empirait de jour en jour ? Bref, tant que je retrouvais ce que je voulais, peut m'importait l'état du reste. Je déjeunai rapidement, pris une courte douche, enfila un t-shirt noir auquel je ne tenais pas trop -le sang, ça laisse des traces- et un jean sombre orné d'une chaîne, ainsi que la veste de mon uniforme, pour qu'on puisse reconnaître mon lycée.

      Une fois dans la rue, je me traitais d'idiot d'avoir oublier que nous ne sommes qu'au début du printemps ? Le froid me saisit et je dû remonter dans mon fouillis, chercher une épaisseur de plus. De nouveau redescendu, je n'avais déjà qu'une envie : retourner dans mon lit. J'avais vraiment mal dormis. Des cauchemars encore. C'était bien le jour tiens ! Moi qui faisais la morale aux autres. Mais moi, je savais qu'une fois en face des poings serrés de mes adversaires, je serais bel et bien réveillé. C'est fou combien l'adrénaline peut vous booster. 

      Je trainais des pieds dans les rues gelées. La nuit avait été fraîche. J'espérais arriver vite au lycée, pour pouvoir me mettre au chaud. La curiosité commençait elle aussi à me gagner : qui allions-nous affronter ? S'il s'agissait d'un combat bien entendu. Et si ça n'était pas ce qui nous attendait ? Hm, ça me surprendrait : Rintaro n'avait pas l'air très original, mais après tout, je ne suis pas dans sa tête non plus. Qui sait ce qu'il cachait. 

      Je devrais vraiment plus me méfier, je sentais que je baissais ma garde et ça n'était pas bon. Tu le ne connais pas Jin, méfie-toi. Tu ne le côtoies que depuis hier. Ne te fais pas avoir.

      Je n'habitais pas très loin du lycée, à quelques rues seulement. En flânant, le trajet était fait en dix minutes. J'apercevais déjà le bâtiment. Et quelques élèves qui se précipitaient d'entrer avant que ça ne sonne s'agitaient. J'avais donc pris tant de retard ? Bref, il me restait juste assez de secondes pour passer la grille avec la sonnerie. Je me dirigeais directement vers ma classe. Tout le monde devait déjà y être.

      Je trainais encore des pieds dans les couloirs, il n'y avait presque plus personne, tous déjà en salle de cours. J'arrivais devant la porte de la mienne et pris place dans la salle, alors que le prof lui-même n'était pas encore arrivé. Rintaro était déjà assis à sa chaise, squattant toujours celle de devant avec ses pieds, la tête penchée. Mes gars qui m'attendaient debout au fond de la classe s'amassèrent autour de ma table.

    - Ne Jin, j'ai vérifié, personne n'est bourré ou crevé aujourd'hui, on est tous d'attaque!
    - Merci Koki, vous êtes allé avec eux ce matin ? Fis-je en désignant d'un mouvement de tête Rintaro. 
    - Nan, on t'as attendu près des couloirs dans la cours, mais on te voyait pas venir et eux étaient déjà montés. 


      Puis on t'a vu arriver d'ici.

    - Okay, ils vous ont pas adressé la parole alors ?
    - Nan, rien du tout, juste des regards et des sourires de certains gars. Surtout le merdeux là, tu sais, celui qui avait fait le guignol hier en cours. 
    - Ouais j'me souviens. Hiroshi ne ?
    - Ouais peut-être, j'l'aime pas lui. J'le sens pas. Trop nerveux.
    Koki se retourna vers le groupe de Rintaro, plus en avant dans la salle, tous à la même place qu'hier, devant à gauche du bureau, côté couloir.
    - Je suis d'accord avec toi.
    - Je suis sûr qu'ils riaient de ce qu'ils nous ont prévus, pour faire nos preuves.
    Entre deux uniformes, je pouvais voir Rintaro qui pivota son visage vers moi, un sourire sadique fendant sa mine sombre. Il me salua légèrement de la tête, je lui répondis par le même hochement.
    - On verra bien qui rira au final

    *****************************************

      Le fond de l'air était frais.

      La fin des cours avait été sonnée et Rintaro nous avait invité à le suivre dans les rues de Tokyo. Voilà quelques dizaines de minutes qu'on marchait ainsi, sans savoir vers où, se doutant de pourquoi. La bande à Rintaro se tenait devant, nous suivions docilement, et je n'aimais pas ça. J'espérais vite faire mes preuves pour moi aussi me tenir au devant. Hors de question que nous restions si bas sur l'échelle plus longtemps.

      Le groupe en avant se stoppa. Nous étions dans une rue quelconque, bordée d'immeubles, blindée d'appartements, mais tout semblait désert. Pas âme qui vive à part nous et les bruits bourdonnants de la ville. Puis le groupe reprit la marche : on grimpa un escalier extérieur pour arriver sur le toit plat d'un de ces immeubles. Rintaro s'avança vers moi, passant au travers de sa horde.

    - Nous y voilà. C'est l'occasion de démontrer ce que vous valez. En bas, dans ... une poignée de minutes, va arriver un sous groupe d'un clan rival du lycée voisin, le lycée Gakushuin. Ils nous ont chercher des noises il y a quelques semaines, et on a pas encore eu l'occasion de leur en reparler en face à face, alors vous allez le faire pour nous. Si vous en êtes capables bien sûr ... 
    - Tu n'as aucun doute à avoir.
    - Chef ! Ils sont déjà là !


      Rintaro eu à peine le temps de se retourner vers celui qui l'interpellait que j'étais déjà dos à lui, me dirigeant vers les escaliers extérieurs collés au flan du bâtiment. Les autres me suivirent la seconde d'après. On arriva en bas, je les entendais venir lentement, en braillant et traînant des pieds sur le bitume alors que j'étais posé contre le mur de l'immeuble, mes gars derrière moi. J'attendais qu'ils se rapprochent, et en profitais pour trouver un motif de combat. Je n'allais pas leur dire qu'on devait leur refaire le portrait pour pouvoir entrer dans le clan de leurs ennemis ! Trop tard, au bruit de leur pas ils ne semblaient plus très loin, j'avançais sur leur chemin nonchalamment. Koki se posta juste derrière moi et les autres s'étalèrent sur toute la largeur du trottoir et la route, bloquant définitivement le passage. 

    - Oh ? On a perdu son chemin ? Lança un des leurs.

    - Hey ! Regardez leur vestes, ils sont du lycée Shôtoku !


      Là, je commençais un peu à stresser. Ils n'étaient pas éméchés. Pas vraiment énervés. Mais qu'est-ce que je pourrais invoquer pour les mettre en rogne ? Hors de question de leur foncer dessus sans donner de raison. Puis une voix derrière moi: 

    - Mais, ... eh toi !
    Keisuke s'avança du groupe, il désignait un autre gars en retrait dans le clan d'en face. 
    - Que- ? Tenta l'interpellé.
    - J'te connais toi ! C'est toi que j'ai vu y'a trois semaine ! 
    - Quoi ?
    - T'as volé ma bécane enflure ! J't'ai vu t'enfuir ! 
    - Hein ?! 
    - Essaie pas d'le nier ! J't'ai vu connard !
    - Tu me parles pas comme ça toi ! J'l'ai pas volée ta bécane ! 
    - Déconne pas ! J'me souviens très bien de ton putain de visage !
    - Bah moi j'peux t'assurer que c'est la première fois que j'vois ta sale tronche ... 


      Soudain, le premier coup de poing partit. Merci Keisuke. La querelle des deux avait contaminé les autres et les coups commencèrent à tomber. Je restais à ma place alors que mes gars s'avançaient à la rencontre de ceux d'en face. J'attendais qu'on vienne me chercher. Ça ne tarda pas. Un mec plutôt gringalet se posta devant moi, avec l'air déterminé des débutants qui ne se sont encore jamais pris une bonne raclée. Sûrement un nouveau, un petit rageur, sans expérience pour penser s'attaquer au chef adverse. Mais son assurance ne fit pas long feu : j'arrêtai son poing à quelques centimètres de mon visage et lui envoya un bon coup dans le ventre avec ma main libre. La pauvre chose se plia à terre et je l'enjambais : il était temps que je me mette dans le feu de l'action. Hormis le petit nouveau déjà KO, ils étaient assez fort. Je constatais que les coups et les cris étaient aussi nombreux d'un côté que de l'autre. En nombre, on était un peu inférieur, de deux ou trois gars, mais on devrait tenir. Non, tenir ne suffisait pas. Il fallait qu'on les écrase, qu'on les démolissent devant les yeux de Rintaro. Alors qu'un nouvel adversaire arrivait vers moi, je jetais un coup d'œil à Koki à ma droite : il achevait de mettre à terre un autre, il croisa mon regard et comprit tout de suite. C'est ça qui est parfait avec Koki : il me connait depuis assez longtemps pour savoir où je veux en venir d'un simple geste. Pas besoin de stratégie planifiée, un seul regard et c'est partit. Il acquiesça et un sourire carnassier apparu sur nos deux visages alors qu'on se tournait chacun vers ceux qui se jetaient sur nous. En l'espace de ces quelques secondes, tout me revint : la rage du combat, la soif de puissance, de force, cette envie irrépressible de tous les clouer au bitume. J'avais l'impression que ça faisait des années que je n'avais pas refait jouer mes poings. Petit à petit, les autres de mes gars nous suivirent dans le délire. Les poings se mirent à saigner, les mâchoires à claquer, les corps à chuter. Puis, pris dans l'ivresse de l'affrontement, j'arrivais enfin à leur chef. Je l'avais identifié tout à l'heure : lui aussi ne s'était pas engagé tout de suite. Il était déjà bien essoufflé et s'était pris quelques coups plutôt violents au visage et au ventre. Nos regards se fixèrent, il m'avait lui aussi reconnu. Mon poing serré le surprit par sa vitesse et il valsa quelques secondes, à moitié sonné. J'attendais sa riposte, et esquiva facilement son coup hasardeux, encore sous le choc du mien. Mais il se reprit et stoppa mon bras avant de m'enfoncer son poing dans le ventre. Deux secondes passèrent où je restais figé, puis je tourna violemment mon bras pour tordre le sien, toujours accroché. Il cria sous la douleur et un coup dans les jambes le fit s'agenouiller devant moi. Je retenais toujours son bras et planta mon regard dans le sien. Il gémit :

    - C'est ... Rintaro ... qui t'envoie, hein ?
    - Moi c'est Akanishi. Souviens-t'en.
    Mon poing rencontra à nouveau sa mâchoire avant de lâcher son bras. Il posa ses mains au sol, crachant un mélange de salive et de sang sur le sol noir. Puis il rit.
    - Tu aimes ça ? Perdre ? 
    - Nan, mais j'me disais ... -Il toussa et se retourna vers moi- Rintaro a recruter des bons cette fois.


      Un sourire sarcastique s'étendit tant bien que mal sur son visage ankylosé de bleus. 

    - Félicitation ! Tu dois être officiellement un de ses chiens maintenant !

      Mes mains se crispèrent et il n'eut pas le temps de rire un nouvelle fois que mon poing s'écrasa brutalement sur sa joue. Il percuta le bitume et ne prit pas la peine de se relever. J'avais gagné. Les bruits derrières et autour de moi s'atténuèrent. Les gars adverses se reculèrent et l'un d'entre eux s'avança vers le corps qui gisait mollement à terre.

    - La partie est finie les gars, on rentre. Lançais-je.

      Puis je me retournai et voulu remonter sur le toit mais Rintaro et les autres étaient déjà au bas des escaliers, dans le coin du mur. 

    - Joli travail Akanishi.
    - Ce n'était qu'une petite remise en forme. 


      Ses lèvres s'étirèrent lentement. Je voyais dans ses yeux que je l'avais marqué. Il faisait tout pour ne rien laisser paraître, pour garder cet air détaché et nonchalant, mais je voyais à son sourire satisfait et la légère lueur admirative de ses prunelles que ma petite démonstration ne le laissait pas indifférent. Je n'en espérais pas moins. 

    - Bien ... je t'annonce que vous faites officiellement, toi et tes gars, partit du groupe. 
    - C'est un honneur. Lâchais-je, faussement impressionné.
    - Sur ce, il est temps de nous quitter. On se revoit demain au lycée, il faudra que je te parle Akanishi. 


      Je levais un sourcil interrogateur mais il ne fit que me sourire et passa à côté de moi. Les autres suivirent. 

      Inutile de dire que j'étais fier de moi.
     
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    Point de vue de Kazuya

      J'entendis la musique de mon réveil matin. Je fis un énorme saut sur le lit. Encore ces cauchemars qui me reviennent soudainement. Je revis sans arrêt ce passage de ma vie où ma meilleure amie s'est élancée dans le vide. Gisante sur le sol froid du stationnement de l'école. Morte sur le coup. J'aurais tellement aimé faire quelque chose pour elle. Voilà! Je suis à nouveau envahi par la mélancolie. Je me secouai la tête pour chasser cette émotion. Et puis, il me semble que je suis comme ça depuis l'arrivée de cette nouvelle dans notre classe, Kiharu. D'ailleurs, ce que j'ai vu hier soir ne me rassurait pas du tout sur l'état des évènements à venir.
     
      Je me levai nonchalant. J'étais encore endormi. Je plaçai correctement mes couvertures toutes froissées de la veille en faisant bien attention à n'oublier aucun pli. J'enfilai mon uniforme que j'avais délicatement posé sur ma chaise d'ordinateur. Descendis rapidement les escaliers. Et comme chaque matin, je pris mon petit déjeuner à la va-vite. Un petit gâteau au chocolat pour la route. Alors que je mis le pied dehors avec mon sac accroché à mon épaule gauche. Je vis une chose surprenante. Je ne l'avais jamais remarqué avant. Kiharu était postée devant une maison. Que, je crois bien, était la sienne. Je me cachai derrière la porte afin qu'elle ne me voit pas. Je regardai par la fenêtre, le temps que je la vois partir. Je ne voulais pas qu'elle me voit avant mon arrivé à l'école.

      Je la vis partir la tête en bas comme à son habitude. On dirait qu'elle n'est vraiment pas sûre d'elle cette fille. Je tournai à nouveau la serrure. Me retrouvant à nouveau à l'extérieur. Je pris ma vieille bicyclette & roula sur la route de l'école en regardant autour dans l'espoir qu'elle avait eu le temps d'arriver entre les murs grotesques de l'établissement éducatif de Shôtoku.
     
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      Je pénétrai dans la classe en manque de souffle. Je recherchais fortement ma respiration régulière. Je jetai un coup d'œil rapide vers la table de Kiharu. Elle n'était toujours pas là. Étrange, elle était pourtant partie devant moi. Peut-être qu'elle s'est perdue.

    - Hey! Kame. Ça va toujours comme tu veux? Me cria Gen'nosuke. Un ami de longue date.
    - Oui. Très bien.
    - Allez viens! Les cours ne sont pas encore commencés.


      Je me dirigeai vers la petite table tout près de la fenêtre. Juste derrière celle de Nakamura. On se rejoint tous les matins au même endroit mais bizarrement aujourd'hui, j'étais un peu perturbé. Est-ce la nouvelle qui me rend si songeur? On jouait au dé pour passer le temps. Le professeur n'était pas encore arrivé, ce qui nous laissait encore du temps libre. Les filles parlaient entre elles. C'était toujours fastidieux de les entendre. Elle connaissait tous les potins du lycée & elles se les racontaient à tour de rôle. Je me suis surpris à les écouter. Décidément, je ne suis pas dans mon état normal aujourd'hui :

    - Hey! Tu sais la nouvelle qui vient d'arriver. À ce qu'on dit, elle ferait partie de la bande à Rintaro.
    - Nooon! Je ne te crois pas...

      Alors, c'était donc vrai. Ce que j'ai vu hier était bien réel. Je devrais peut-être lui en parler. Soudain, le silence tomba dans la classe. Je me retournai vers la porte d'entrée. Je vis Jin marchant lentement vers sa table. Il avait des ecchymoses un peu partout sur le corps. Rintaro s'est charger de lui ou s'est-il tout simplement battu? Allez savoir. On le connaît à peine. Après tout, il est nouveau lui aussi. Des murmures se firent entendre un peu partout dans la pièce. Il n'avait pas l'air de s'en soucier. Il gardait son regard immobile & sa bouche affichait un sourire presque invisible comme un baiser au coin de ses lèvres.

      Il était suivi par Kiharu. Elle marchait toujours tête baissée. Ne faisant guère attention aux élèves qui l'entouraient. Elle prit place à son tour. Le temps reprit son court normal comme s'il ne s'était jamais arrêté pour les laisser entrer.

      Le professeur venait de s'installer à son bureau. Déposant tout son matériel. J'allai m'asseoir à mon endroit habituel. Je regardai Kiharu :

    - Ohayo! Dis-je avec un petit signe de peace pour la mettre à l'aise.
    - Ohayo! Murmura-t-elle. Presque inaudible pour mes oreilles.


      Le cours prit alors la tournure quotidienne. Nakamura qui faisait des siennes. Les élèves qui ne disaient rien. Ça m'avait même surpris que Kiharu ne parle pas. Elle qui avait l'air si enthousiaste hier à répondre aux questions de l'enseignant.

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      Enfin, le supplice terminé. Je me levai, serrant mes choses une par une. Je jetai des regards furtifs vers ma voisine de table. Espérant qu'elle ne partirait pas sans moi. Je devais absolument lui parler. C'était même vital. Je regardai alors vers elle. La distingua dans les moindres détails. Elle me fixait de ses yeux couleur émeraude comme si elle voulait partager quelque chose avec moi :

    - Hum...alors le cours? Il était intéressant n'est-ce pas? Me fit-telle pour engager la conversation.
    - Oui, très sympa comme d'habitude.


      À ces mots, elle riait aux éclats. Ce devait être la tronche que j'ai acquiescé qui l'a faisait rire. Il fallait vraiment que je trouve un moyen de lui parler de ce qui me tracassait depuis hier mais comment?

    - Alors, c'est toujours comme ça? Nakamura fait toujours...

      Elle n'a pas eu le temps de finir sa phrase, je la coupai net. Je regardai autour de moi. Essayant d'éviter les regards des autres. Je lui fis signe d'avancer :

    - Hum...Je t'ai vu au parc hier...
    - Ah...hum...je...
    - Ne te justifie pas. Tu n'as pas de compte à me rendre. Seulement, la bande à Rintaro n'est pas très fréquentable. Ce sont des bandits de bas étages. Ils contrôlent tout ici. Je crois même que ce Jin est rallié à leur cause.
    - Je sais...Je ne peux pas faire autrement. Ce n'est pas que j'ai peur mais je ne veux pas d'ennuis.
    - Tu as le choix. Reste avec moi. Tu n'auras pas de problème.
    - ...


      Elle semblait hésiter face à ma proposition :

    - C'est l'heure de diner. As-tu faim? Je connais un endroit peu fréquenté. On sera plus tranquille pour discuter. Enfin, si tu veux bien.

      Kiharu me fit un signe de tête comme approbation. Je lui pris la main & l'emmena dans une classe. Il y avait déjà quelqu'un assis à une table mangeant son bentō. C'était Yachiru! Je fis une grimace en la voyant. Je ne croyais pas qu'elle serait là aujourd'hui. Jeune fille un peu associable, elle était toujours à l'écart des autres. Même entourée de monde, elle trouvait toujours un moyen de se mettre de côté. J'y pense! Ça serait l'amie rêvée pour Kiharu. Elle n'a pas l'air d'être ordinairement misanthrope mais elle n'aime pas être entourée non plus...

    - Konnichiwa Yachiru!

      Elle nous lança un léger regard & continua ses activités. J'essayais tant bien que mal de la faire réagir mais sans succès. À croire qu'elle voulait réellement la paix. Nous, nous pressâmes de s'assoir à une table tout près d'elle. Yachiru finit enfin son bentō, le ferma et le rangea dans son sac. Puis, elle posa à nouveau les yeux vers nous :

    - Alors c'est donc toi la nouvelle? Je me trompe?
    - Hum...Oui. Tu as entendu parler de moi? Fit Kiharu avec un tremblement dans la voix.
    - Bien sûr. Tout le monde ne parle que de ça.


      À les entendre parler, j'avais l'impression que Yachiru ne détestait pas du tout discuter. Qu'elle était plutôt ouverte sur différents sujets. Peut-être est-ce la présence de Kiharu qui la rendait si différente? D'ailleurs, c'était ce que cette nouvelle élève avait fait sur moi. Je voyais Yachiru sur un autre jour. Elle semblait ne pas être comme d'habitude. De nature renfermée, elle ne partageait pas grand-chose avec les gens. Tandis que maintenant, elle avait ce pouvoir de persuasion sur Kiharu que je n'avais pas, il y a de cela quelques minutes.

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